Le CDI senior, ou contrat de valorisation de l’expérience, a été définitivement adopté par les députés le 15 octobre 2025, après validation par le Sénat durant l’été. Ce nouveau contrat de travail s’inscrit dans le cadre du projet de loi pour le plein emploi porté par le ministère du Travail et vise à favoriser l’embauche des seniors âgés de 60 ans et plus.
Expérimenté pendant cinq ans, ce dispositif entend répondre à un double enjeu : soutenir le taux d’emploi des seniors en France et accompagner la réforme des retraites, qui a repoussé l’âge légal de départ à 64 ans. En offrant une solution de stabilité professionnelle jusqu’à la retraite à taux plein, ce contrat ambitionne de replacer les salariés expérimentés au cœur du marché du travail.
Pour le ministre du Travail, il s’agit avant tout d’un “outil de confiance”, capable de renforcer la motivation des plus de 60 ans à rester actifs tout en répondant aux besoins des entreprises confrontées à des pénuries de main-d’œuvre. Reste désormais à savoir si cette mise en place permettra d’atteindre les objectifs d’inclusion et de transmission de l’expérience fixés par le gouvernement.
Un taux d’emploi des seniors encore trop faible en France
En France, le taux d’emploi des seniors reste l’un des plus faibles d’Europe, malgré les réformes successives visant à prolonger la vie au travail. Selon la DARES, seuls 57 % des 55-64 ans occupaient encore un emploi en 2025, contre plus de 70 % en Allemagne et en Suède. La situation est encore plus préoccupante pour les 60-64 ans, dont à peine un tiers exercent une activité professionnelle. À l’autre extrémité, les 57 ans subissent souvent une perte d’emploi difficile à compenser, les entreprises hésitant encore à investir dans des salariés expérimentés à l’approche de la retraite.
Cette fragilité s’explique par plusieurs facteurs : usure professionnelle, arrêts maladie plus fréquents, difficultés d’accès à la formation, mais aussi une culture de l’inclusion encore incomplète au sein des entreprises. Beaucoup de seniors voient leur carrière se bloquer dès la cinquantaine, avant un départ anticipé ou une réorientation contrainte. Le résultat est un taux de chômage des plus de 60 ans en progression constante, accentué par la réforme des retraites qui a repoussé l’âge légal de départ à 64 ans.
C’est pour inverser cette tendance que le gouvernement a lancé le CDI senior, un nouveau contrat pensé pour** valoriser l’expérience** et maintenir les salariés âgés de 60 ans dans l’emploi jusqu’à leur retraite à taux plein. En encourageant l’embauche des seniors, il entend également renforcer l’inclusion au sein du marché du travail, un enjeu social et économique majeur pour les années à venir.
Qu’est-ce que le CDI senior ?
Le CDI senior (ou contrat de valorisation de l’expérience) reprend les bases d’un CDI classique, avec une spécificité clé : le contrat prend fin automatiquement lorsque le salarié atteint sa retraite à taux plein. Il s’adresse en priorité aux demandeurs d’emploi de 60 ans et plus, afin de leur offrir une stabilité jusqu’au départ effectif, tout en sécurisant la fin de carrière.
Pour les employeurs, rien ne change sur l’ossature juridique : période d’essai, rémunération, formation, et possibilités de rupture restent celles du Code du travail. L’intérêt, en revanche, est double : capitaliser sur l’expérience de profils confirmés et organiser une transmission des savoirs au sein des équipes, là où les besoins opérationnels sont souvent criants.
À noter : le dispositif s’inscrit aussi dans le budget 2026, avec des crédits dédiés au ministère du Travail pour soutenir l’embauche des seniors (accompagnement, aides ciblées, actions en matière de formation), afin de renforcer l’inclusion en entreprise et de donner toutes ses chances à ce nouveau contrat
Quelles sont les conditions pour bénéficier du CDI senior ?
Le CDI senior vise d’abord les demandeurs d’emploi de 60 ans et plus qui n’ont pas encore validé tous leurs trimestres pour une retraite à taux plein. L’idée est simple : offrir une trajectoire stable jusqu’au départ effectif, sans enchaîner les contrats courts en fin de carrière.
Côté salariés
Pour entrer dans le dispositif, il faut avoir au moins 60 ans à la signature, être inscrit auprès de France Travail et ne pas remplir encore les conditions du taux plein. Des ouvertures à partir de 57 ans pourraient être prévues par accord de branche : ce point dépendra des textes d’application.
Côté employeurs
Toutes les entreprises peuvent recourir au CDI senior, quel que soit leur secteur. Le contrat devra préciser qu’il s’agit d’un contrat de valorisation de l’expérience, conclu dans le cadre de l’expérimentation. Des incitations financières (exonérations, aides ciblées) sont évoquées par le gouvernement, mais leurs modalités exactes seront fixées par décret. Autrement dit : le principe est acté, les détails restent à encadrer.
Durée et fin du contrat
Le CDI senior est un CDI au sens du Code du travail. Il peut donc prendre fin dans les cas habituels (démission, rupture conventionnelle, licenciement). Sa particularité tient à son terme naturel : le contrat s’achève automatiquement lorsque le salarié atteint sa retraite à taux plein. Cette architecture donne de la visibilité aux deux parties, tout en s’inscrivant dans les nouvelles règles de maintien en emploi des plus de 60 ans.
CDI senior : promesses, limites et premières critiques
Présenté comme l’une des mesures phares de la loi pour le plein emploi, le CDI senior traduit la volonté du gouvernement de mieux intégrer les plus de 60 ans dans l’économie. L’initiative suscite des attentes réelles chez les salariés comme chez les employeurs, mais son impact concret fait déjà débat.
Les promesses du dispositif
Pour les seniors, ce nouveau contrat offre un cadre stable après une période de chômage : retour à l’emploi durable, maintien du niveau de vie et poursuite des cotisations jusqu’à la retraite à taux plein. Les droits sont ceux d’un CDI classique (congés, formation, protection sociale), ce qui met fin à la succession de contrats courts qui fragilise souvent la fin de carrière.
Côté entreprises, l’intérêt est clair : capitaliser sur l’expérience, organiser la transmission des savoirs et, à court terme, atténuer certaines pénuries de main-d’œuvre dans les métiers techniques ou industriels. Plusieurs organisations du patronat saluent une mesure pragmatique, susceptible d’apporter des réponses opérationnelles immédiates.
Les limites et premières critiques
Le CDI senior divise. Son caractère expérimental limité à cinq ans interroge sur la portée réelle du dispositif. Les modalités d’application, notamment d’éventuelles exonérations de cotisations, ne sont pas encore arrêtées et pèseront fortement sur l’appétence des employeurs.
Du côté des syndicats, la crainte d’un “contrat à part” refait surface, avec le risque d’entretenir une stigmatisation liée à l’âge plutôt que de la réduire. Plus largement, beaucoup rappellent que le CDI senior ne règle pas les causes profondes du décrochage : usure professionnelle, reconversion complexe, adaptation des postes encore insuffisante. Sans agir sur ces leviers, le maintien dans l’emploi des plus de 60 ans restera difficile.